TABLEAUX MODERNES - ECOLES BRETONNES
samedi 21 juillet 2018 à 14:30

Lot 61 Maurice DENIS (1870-1943)

Maurice DENIS (1870-1943) "Les bateaux jaunes" gouache et fusain sur papier, mbd, 1893, 64,5x50,5. Provenance : Galerie Bérès, Paris. Collection Etienne Bréton, Paris. Collection particulière, Paris. Claire Denis a établi un certificat disant que l'œuvre est bien une œuvre de Maurice Denis et qu'elle est enregistrée dans les archives du Catalogue raisonné Maurice Denis. "Dès la création de leur groupe, les Nabis, -Sérusier, Denis, Bonnard, Vuillard, Ibels, Roussel, Piot, Ranson -, manifestent de l'intérêt pour l'art décoratif. Selon eux, la création picturale ne doit pas s'en tenir à la peinture de chevalet, mais concerner toutes les types de décors, tous les aspects de la vie quotidienne et d'autres formes d'expression comme la littérature ou le théâtre. Ces dispositions, très novatrices dans le milieu de la peinture en France à l'époque, vont s'appliquer immédiatement avec un foisonnement de réalisations et une inventivité extraordinaire qui nous laissent pantois encore aujourd'hui : outre les fresques murales, des paravents, éventails, affiches, vitraux, tapisseries, objets en céramique, livres illustrés ou programmes de théâtre seront créés en quelques années. Dans ces recherches protéiformes, le papier peint occupe une place à part avec la possibilité de réaliser la décoration globale d'une pièce. Les contraintes techniques y sont importantes : verticalité du motif, répétition du sujet, nombre des couleurs, largeur du lé, jeu des raccords, etc. Maurice Denis s'est passionné pour cette recherche, au point de réaliser une douzaine de projets, partant de motifs comme un bateau, un animal, un bouquet ou des fillettes. Il exposera quatre cartons en 1893 à la galerie Le Barc de Boutteville, affirmant ainsi la place qu'il confère à de tels projets. Le thème du bateau est décliné en deux versions, les Bateaux roses et les Bateaux jaunes, avec des variations dans le traitement du gréement et le rendu décoratif des vagues.Ce grand dessin intitulé les Bateaux jaunes correspond à la dernière étape avant le projet définitif, de format 79 x 50, daté 1893, aujourd'hui conservé au musée départemental Maurice Denis de Saint-Germain-en-Laye. Le peintre qui a parfaitement compris les principes du papier peint en décor mural, a choisi comme motif un bateau dont il stylise la coque et le gréement. Il a déjà peint ce genre d'embarcation pour une scène de plage, Jeunes filles sur la plage de Trestraou (1891) et des scènes de régates à Perros-Guirec (1892). Pour ce motif, il reprend un bateau manœuvré à la rame par un marin, les voiles affalées, que l'on trouve dans une peinture au titre allégorique, Ils virent des fées débarquer sur les plages (1893). Sur l'étude de papier peint, il dispose entre chaque bateau, à l'image de ce que l'on voit dans les estampes japonaises, des vaguelettes stylisées qui se retrouvent dans l'écume soulevée par l'étrave des trois bateaux. Le vert foncé et profond de la mer fait écho au mauvais temps et à la difficulté du marin à manœuvrer. La comparaison avec le carton du papier peint montre que Maurice Denis se contentera d'étirer le motif en hauteur et de simplifier la forme et le rythme des " moutons " blancs pour arriver au projet définitif. Lors de la commercialisation (finalement seul le papier montrant les Bateaux roses fut réalisé), la publicité de l'Estampe originale apporta les précisions suivantes : " … ce modèle et les suivants sont exécutés directement en lithographie par l'auteur. Nous voulons en les présentant au public, réagir avec son aide contre la banalité des similicuirs, des similifaïences et des similiétoffes Louis XV, Louis XVI ou Henri II, seul idéal moderne des fabricants de papier peint. " Avec une grande économie de moyens, - seulement deux couleurs en aplats et celle du papier en réserve -, et deux simples sujets stylisés, Maurice Denis fait preuve d'une grande audace. Par ce projet de papier peint, il veut proposer à ses contemporains, pour décorer leurs intérieurs, ce qu'il considère comme l'art de son temps. Cette étude de papier peint est l'une des réussites des Nabis dans le domaine de l'art décoratif et se situe à un moment, - 1893-, de très grande créativité. Elle montre aussi comment Maurice Denis a tiré profit des leçons du synthétisme pontavénien pour élaborer des œuvres particulièrement novatrices ".André Cariou

Estimation : 40 000 € / 60 000 €